Prononcer ce nom est déjà un exploit. Guadalajara est la
deuxième métropole du Mexique. C’est ici que sont nés les Mariachis, leur
musique les sombréros. Comme d’habitude l’autobus me dépose à Outsiplou et j’ai
trop la flemme pour chercher un moyen de transport économique pour rallier mon
hostel. Le chauffeur de taxi me vante pourtant le métro de sa ville. Plus
moderne que celui de Mexico il comporte trois lignes ce qui me parait peu. Il est
en grande partie aérien. Moi je ne lui ai rien trouvé d’extraordinaire. Il est
rapide certes, mais toutes les stations se ressemblent et on s’y perd
facilement.
Je suis arrivé un jour de fête ; la fête de la lumière.
Au centre historique près de mon hostel tout est éclairé. Il est 21 heures
quand je débarque et tout de suite je suis pris en charge par toute l’équipe et
par les hôtes, on va à la fête de la lumière. Pas question de refuser toute la
ville s’y retrouve. Sur 4 kilomètres, des feux d’artifices, des lumières, des
projections. Mais surtout une foule comme je n’en ai jamais vue. On suit le
mouvement bien incapable de prendre un autre chemin. Un pareil évènement serait
interdit en Belgique pour des raisons de sécurité. Il n’y a pourtant pas eu
d’incidents. N’est-on pas trop prudent en Europe. Ne se prive-on pas d’émotion
au nom de la sécurité.
Tout étourdis de bruits et de lumières nous sommes revenus à
l’hostel que j’ai enfin découvert. Un dédale de couloirs et de chambres décoré
de thèmes bouddhistes et de drapeaux arc en ciel. Ça sent l’encens, il y a
plein de petits endroits où l’on peut se poser lire ou travailler ou chiller.
La chère sert de point de rencontre c’est là qu’on papote, qu’on partage la
nourriture. Et puis, il y a le roof-top. Une énorme terrasse sur le toit, des
fauteuils, des chaises, des tables, un hamac , une forte odeur d’herbe, tout ce
qu’il faut pour somnoler ou lire au soleil. Ce lieu est un havre de paix chacun
prend une tâche en main spontanément parce que c’est utile à ce moment. Je suis
le seul étranger et ça aussi ça me plait.
Je partageais ma chambre avec un mec de quarante ans
originaire de Veracruz qui sillonnait son pays pour vendre un produit nettoyant
de son invention. Chaque soir Il faisait son mélange, remplissait une dizaine
de bouteilles qu’il vendait le lendemain. Il collait ses étiquettes, garnissait
la bouteille d’un vaporisateur. Il vendait chaque bouteille 100 pesos. Pas de
marque pas de composition sur l’étiquette. Le produit n’était pas enregistré ni
protégé sinon on lui réclamerait des taxes. Son entreprise n’était donc pas
déclarée, et son produit n’était pas protégé contre d’éventuelles copies. Comme
je lui faisais remarquer que cela me paraissait bien risqué, il me répondait le
Mexique est grand et qu’il y a toujours une place pour les petits. Si on copie
mon produit, j’en créerai un autre me dit-il. Quand je l’informais de toutes
les tracasseries qu’il aurait à subir s’il était en Belgique, il dodelinait de
la tête l’air de dire « quel pays compliqué ». Je ne pouvais pas lui
donner tort. Je n’ai pas pu résister à l’idée d’en rajouter une couche en lui
expliquant nos trois langues nationales nos régions, communautés et nos neuf
ministres de la santé pour nos 11 millions d’habitants. A ses yeux, on a l’art
de nous compliquer la vie.

Au Mexique malgré une corruption démesurée tout se passe
dans la simplicité. Le revenu moyen est de 250 pesos par jour. Le chômage est
très important, alors le gouvernement ferme les yeux sur tous les petits
métiers de rue. Le plus important n’est-il pas que les gens mangent. Ils
pensent moins à manifester le ventre plein avec un bon système de santé
accessible à la majorité. Le mexicain parait docile à en croire la facilité
avec laquelle les mesures anti-Covid ont été acceptées et appliquées. Il faut
dire que toutes ces mesures sont rabâchées par tous les médias en permanence.
Le mexicain, me dit mon compagnon, comme la plupart des gens du sud sont
joviaux, ils aiment le contact social, la musique, ils aiment faire la fête et
pour eux la famille est très importante. Ils sont aussi très tactiles. C’est
vrai que ce sont toujours eux qui m’adressent la parole en premier. Chez nous
on est un peu froid. Eux ils me posent des questions sur la Belgique le climat
la langue, où je vais, d’où je viens pourquoi le Mexique. Ils m’indiquent un
lieu à ne pas rater. Le week-end, ils sortent en famille, il faut dire que le
climat le permet. Au minimum trois générations se retrouvent dans un lieu
touristique ou simplement au restau, sur une plage ou une place. On sort les
canettes, l’enceinte Bluetooth et on parle. Si l’on en juge par la taille des
gazinières en vente dans les magasins d’électroménagers les familles sont
nombreuses. Je n’en ai pas vu à moins de six becs les frigos, pareil.

Le lendemain de mon arrivée c’était dimanche. A Guadalajara,
le dimanche, les grandes rues du centre sont réservées aux vélos. C’est un peu
comme la journée sans voiture mais tous les dimanches. A chaque carrefour, un
agent de la circulation muni d’un drapeau et d’une barrière mobile. Il y a
beaucoup de vélos. L’atmosphère est plutôt festive. Les bancs des places sont
tous occupés Les vendeurs de glaces ont fort à faire, les vendeurs de churros
sont aussi fort occupés. Les stands d’artisanats sont pris d’assaut et la
plupart des magasins, les marchés sont ouverts. Autant à Mérida le dimanche
était-il jour mort, autant ici ou à Mexico le week-end est jour de fête où l’on
dépense sans compter.
Quelques jours après, c’était le 8 mars Le début du
troisième mois de mon périple, mais aussi la journée de « lutte pour les
droits de la femme » comme on dit chez nous. Ici plus simplement :
« El dia de las mujeres »
J’aime autant vous dire qu’on prend cela au sérieux. Dès midi les rues sont
piétonnes pour faire place au défilé. Deux heures après les rues du centre sont
noires de monde hommes et femmes. Des slogans dénonçant injustices, inégalités,
brutalités voire les féminicides sont scandés à l’unisson. Ce n’est que vers
minuit que la manifestation s’essouffle et que le calme revient peu à peu. A
cette heure les bars sont fermés il n’y as pas de débordements
Guadalajara n’est pas une cité dont l’architecture raconte
l’histoire. Même la cathédrale a été reconstruite plusieurs fois et ne dégage
aucune aura. La ville n’est pas extrêmement propre non plus. Ici les gens ne se
bousculent pas pour nettoyer leur pas de porte comme dans les autres villes.
Je
me suis baladé du côté du marché San Juan de Dios. Enorme, construit sur trois
niveaux, on y trouve de tout : fruits, légumes, restauration comme
d’habitude mais fringues, chemises, casseroles en terre cuite (traditionnelle)
une part importante du marché est réservée à l’équitation. On trouve des selles
d’apparat, des sombreros, des bottes en
peau d’autruche ou de crocodile et des éperons qui font bling bling. Dans le
même coin on peut choisir une tenue de mariachi.

Guadalajara n’est pas loin de Tequila. Alors que l’état de
tabasco n’a rien à voir avec la sauce pimentée qu’on connait, Tequila est bien
la ville originaire de la boisson. Tequila est une petite ville charmante et
colorée et dédiée vous l’aurez deviné au tourisme tournant autour du Téquila
puisque l’on devrait dire LE Téquila car il s’accorde en genre avec « reposado, añejo ». Cette ville est
entourée de distilleries et la région est couverte de champs d’agaves bleus. (eh
oui on dit UN agave ! )Des agaves alignés à perte de vue. L’agave bleu ou tequilana est le seul que l’on puisse
cultiver. Entre 4 et 7 ans sont nécessaires pour qu’il atteigne maturité, il
est cueilli avant floraison, on le débarrasse de ses feuilles, il en résulte la
piña que l’on cuit quelques heures pour transformer les amidons en sucre, avant
de la broyer pour en récolter le jus. Ce jus est mis en fermentation quelques
jours puis distillé jusqu’à obtention d’un alcool de plus ou moins 60° que l’on
équilibre entre 35 et 50° par l’adjonction d’eau distillée. On a alors la Téquila
Blanco. Celle-ci peut être vieillie plus ou moins longtemps en fut de chêne
après adjonction d’un colorant à base de caramel. En fonction du temps de
conservation on obtient la téquila reposado (2 mois), Añejo (plus d’un an),
Extra Añejo (trois ans).Boire la téquila après avoir léché du sel et croqué un
citron vert est un mythe popularisé par le cinéma américain des années 40. (je
n’arrive pas à féminiser le nom de cette boisson.)
C’est en quittant Guadalajara en passant devant la place « Niños
Heros » honorant les cadets
mexicains qui se sont sacrifiés lors de la bataille de Chapultepec
(1847)que j’ai vu ce monument couvert d’affiches signalant des disparitions il
y en avait plusieurs centaines.
D’habitude on en voit quelques une éparses sur les murs, signalant la
disparition de jeunes gens. L’affiche comporte une photo et une description de
la personne disparue la date de la disparition. On soupçonne des enlèvements,
des crimes de cartel ou des motifs politiques. Ici les affiches étaient
tellement nombreuses qu’elles couvraient le monument pourtant gigantesque.
Je n’ai pas vu de mariachi, pourtant j’ai erré dans le
quartier où ils étaient censés se produire. Le bus m’emmène vers Manzanillo le
second port le plus important de la côte pacifique aussi connu pour son
concours de pêche au Marlin.
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Tienda naturista
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Entrée de mon hostel.
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RépondreSupprimerNous voilà spécialistes en tequila ;-) à cette concentration ça fait des trous par où ça passe !
RépondreSupprimerAs-tu craqué pour ces terribles bottes ? mais en bermuda ou short ça ferait un peu bizarre.
Tous tes articles relatent des ambiances différentes. Profite bien, ici l'ambiance n'est pas à son meilleur...